À Sète, un navire-usine se convertit au gel hydroalcoolique
Basé dans la ville méditerranéenne depuis l’automne 2019, le navire Odeep One pompe habituellement de l’eau de mer et la dessale avant de l’embouteiller. Bloqué à quai par le confinement, il a modifié sa chaîne de production pour la fabrication de gel hydroalcoolique.
L’Odeep One effectuait ses préparatifs pour sa prochaine campagne de collecte d’eau de mer quand le confinement est venu perturber ses projets. Alors qu’il embouteille habituellement de l’eau dessalée, le navire-usine a modifié dès le 19 mars ses installations pour produire chaque semaine 600 t de gel hydroalcoolique utilisé pour la désinfection des mains, mais dont la disponibilité fait cruellement défaut en France.
Le 31 mars, 35 m3 d’éthanol ont été livrés au navire amarré à Sète, lui permettant de démarrer immédiatement sa production.
Ancien ferry-train construit en 1985 à Wismar, en Allemagne de l’Est, successivement appelé Mukran puis Petersburg, l’actuel Odeep One a longtemps navigué en mer Baltique avant d’être racheté l’an dernier par OFW Ships, qui l’a placé sous pavillon panaméen et l’a fait transformer aux chantiers de Gdansk.
Sa nouvelle mission : pomper de l’eau de mer, au large des côtes, à des profondeurs de plusieurs centaines de mètres, la dessaler à bord par osmose inverse et la mettre en bouteille. Le breuvage riche en éléments marins et débarrassé de toutes ses impuretés, tel qu’il est vanté par le marketing, cible des consommateurs CSP +.
Deux millions de bouteilles par semaine
Le navire dispose d’une réserve de 3 millions de bouteilles préformées en PET. Les vérifications faites, elles conviennent au milieu hospitalier et médical. La bouteille est non compactable et son atout majeur est son pas de vis spécifique. « Il correspond aux standards des pompes que l’on trouve dans le commerce », précise Ocean Fresh Water Ships, l’armateur français du navire. « Nous avons réalisé des tests avec le concours de plusieurs infirmières ; les pompes utilisées en milieu hospitalier sont compatibles. » Le gel hydroalcoolique peut aussi être conditionné, à bord du navire, dans des cubitainers de 5 litres.
À bord, les 46 officiers et marins sont habitués à travailler en continu, par quarts, à l’embouteillage, selon un rythme qui peut atteindre 2 millions de bouteilles par semaine.
Le navire « pêcheur d’eau » est à Sète depuis l’automne 2019. Les ingénieurs et chimistes du bord, officiers de marine marchande procèdent aux réglages de la production d’eau en bouteille lorsque l’heure du confinement a sonné. L’orientation de sa production vers le gel hydroalcoolique a été décidé le jour même par le patron d’OFW Ships, Régis Revilliod, qui a lancé dans la foulée un double appel : la jeune société cherche d’une part des financements solidaires pour soutenir son nouveau projet, et d’autre part de l’éthanol pour assurer sa production.